Un Carros plutôt féroce
Durant tout l’été, difficile de totalement couper et ne pas penser au basket.
Après les longues réflexions qui menèrent à la mutation de Zoé, elle avait maintenant rendez-vous avec divers stages de perfectionnement plutôt enthousiasmants.
Ces stages me permirent d’avaler pas moins de 5 mille kilomètres pour aller de villes en villes, de bons moments pimentés de stressantes péripéties, notamment en terres perpignanaises.
Le mauvais œil allait finir par frapper Zoé qui se donnait une vilaine entorse à la cheville gauche une poignée de semaines avant la reprise avec son nouveau club. La première vraie entorse d’un corps plus aussi souple et permissif que celui de la jeune et insouciante enfant qu’elle était jusqu’alors. En l’absence d’un diagnostic immédiat pour déterminer la gravité de la blessure, les semaines s’écoulèrent et allaient contrarier la partie « remise en condition physique » puis la reprise collective en salle. A force de travail, de repos, de reconstruction, et avec la volonté de Zoé de disputer absolument le premier match de la saison contre Carros, il s’était engagé une course contre la montre que n’aurait pas renié le lapin d’Alice au Pays des Merveilles.
Avec 9 semaines d’arrêt, elle allait manquer de jus, de précision, d’un peu de tout en fait, mais avec un bon strap sur la cheville, elle allait rejoindre ce nouveau groupe de filles constitué de plusieurs éléments venus d’autres clubs. Il me semble important de préciser d’ailleurs que les filles allaient mieux s’intégrer à ce nouveau groupe que Bilal Hassani s’il allait faire du tourisme à Kaboul.
Elles avaient toutes envie d’en découdre et j’en veux pour preuve leur heure d’arrivée. Elles étaient toutes là à l’heure pile de leurs iWatches. Vous connaissez l’Apple Watch ? Ce sont des montres très pratiques parce qu’elles reçoivent des emails. Vous pouvez demander à votre tante par email « Quelle heure est-il ? », elle vous répond et, du coup, vous avez l’heure.
Avec peu de sessions communes à leur actif, les filles allaient se découvrir sur le terrain, en situation, et voir ce qu’elles pouvaient offrir à leur entraîneur. Quoi qu’il se passe, la saison serait longue et allait nous proposer de multiples épisodes comme à la grande époque de « Marc et Sophie ».
L’arbitre, Sofiane Miraoui, allait officier seul, la tâche allait être ardue pour toutes les parties, mais nous allions devoir composer avec ces données.
Franklin décidait de lancer dans le cinq majeur Léana, Maguette, Zoé, Jana et Clara.
Sur l’entre-deux, Ella, l’intérieure carrosienne, prenait le dessus sur Maguette, handicapée par une douleur persistante au genou gauche.
Sur la première tentative de Léana, Carros prenait le rebond et marquait en contre-attaque, ce furent les 2 premiers points marqués de cette nouvelle saison, le match était bel et bien lancé.
C’était ensuite au tour de Zoé de marquer ses premiers points de la saison pour égaliser à 2 partout, puis Jana donnait l’avantage au MBA.
Carros tenait au score grâce à des lancers-francs obtenus sur des fautes monégasques.
Mais 2 belles actions permettaient à notre équipe de se décoller légèrement.
La première suite à une contre-attaque de nos jumelles, quand Tinane passait à Maguette qui marquait, la deuxième quand Zoé lançait Chiara Vallicioni, qui passait à Chiara Ivaldi pour mener 10-6, moment où le coach de Carros prenait son premier temps-mort.
Cette pause faisait du bien à nos adversaires qui marquaient dès la reprise un panier gag pratiquement dos au panier, puis un autre pour égaliser.
Zoé avançait tambour battant et déboulait dans la raquette adverse tel Cherif Cherkatt quand il visite le marché de Noël de Strasbourg. Une petite arabesque plus tard et nous menions 12-10, juste avant que Perrine Loynet ne se joue de nos 2 intérieures, elle venait de Ben Ladeniser nos Twin Towers pour égaliser une fois encore.
Ce petit mano à mano durait encore quelques instants, jusqu’à 16 partout, puis Zoé regagnait le banc pour souffler un peu. Carros profitait de nouvelles fautes pour prendre un peu d’avance sur lancers-francs et remportait la première période sur le score de 19 à 16. Rien de bien rédhibitoire et un début de match encourageant compte tenu des éléments de cette première saison de cette toute nouvelle équipe. A noter que Carros était dans le match grâce à 7 lancers convertis, et si parfois il y avait un peu de confusion, l’ensemble du match était plutôt équilibré.
Le deuxième quart-temps redémarrait, mais nous étions un peu à la peine et vite menés 23-16, avant que Chiara, Ivaldi, ne trouve le chemin du filet pour marquer son double-pas, et obtenir la faute, pour convertir un lancer supplémentaire.
Carros profitait de quelques cafouillages et pertes de balles pour lancer des contre-attaques efficaces et reprenait le large à 27-18.
Le manque de rythme était flagrant pour les 2 équipes, et la précision aux tirs s’en ressentait, au point de voir plusieurs airballs.
Mais Clara ne loupait pas son tir et rentrait un joli 3 points, puis inscrivait un nouveau panier sur une passe de Zoé. Le MBA revenait à 27-24, moment où les manifestations de fairplay se firent entendre de certains supporters, quand Zoé lançait à son tour un airball à 3 points.
Des jeunes filles en reprise de championnat et dont l’assurance n’est pas maximale n’ont pas besoin d’entendre des sarcasmes de qui que ce soit. Il s’agit là d’attitude déplorable qui laisse penser que, à leur mort, ces supporters croupiront en enfer avec Slobodan Milosevic et le parolier d’Aya Nakamura.
Sur l’action suivante, Zoé lançait Jana qui marquait son double-pas et nous étions toujours au contact, à 29-26.
Mais en fin de période, nous allions rencontrer quelques difficultés au rebond et Carros allait marquer 8 points d’affilée, ce qui semait un peu le doute dans l’esprit de nos joueuses.
Sur une remise en jeu, Jana partait vite en attaque et recevait des mains de Zoé une passe millimétrée qu’elle convertissait en obtenant en plus la faute de son adversaire.
On peut dire que seuls les vrais esthètes auraient pu apprécier la beauté et la qualité de cette action, puis l’expliquer aux autres. C’est comme Game of Thrones, ils sont véritablement 4 dans le monde à tout comprendre parce que sinon, franchement, des histoires d’inceste et de loups, vous lisez le journal local dans les Vosges, vous avez la même chose.
Bref, nos cadettes perdaient ce quart-temps 22-14 et, à la mi-temps, nous étions menés de 11 points à 41-30. Il convient de préciser que nos filles venaient de lutter contre 20 minutes de zone, cette défense si formatrice qui permet de remporter des petites victoires basées sur le déchet aux shoots de son adversaire.
Les choses allaient-elles changer avec cette défense à la reprise ? Et bien force est de constater qu’il y avait eu autant de changements que dans la coupe de cheveux de Mireille Mathieu ces 50 dernières années.
Le début était difficile, Zoé perdait le ballon et Carros s’empressait de le convertir en points, et marquait un deuxième panier dans la foulée. Puis encore un, nous étions menés 47-30 et ça commençait à devenir aussi angoissant qu’un roman de Stephen King, qui fêtait ce 21 septembre ses 72 ans.
Cette troisième période allait donner lieu à un échange un peu rugueux entre les joueuses, entre les nôtres qui cherchaient à refaire leur retard et nos adversaires qui essayaient de contenir ces assauts répétés.
Zoé lançait Jana qui marquait et obtenait la faute, puis ce fût au tour de Zoé de marquer un panier, puis encore Jana après un rebond offensif, le score était alors de 56-47 et nous avions encore 11 points de retard.
Jusqu’à cet instant où la lutte acharnée pour la conquête de la balle faisait rage et un combat entre Jana et Ella se terminait au sol. C’était une action tellement bourrine qu’elle aurait pu être commentée par Pierrette Brès.
Quelques actions désordonnées de nos joueuses permettaient à Carros de se ressaisir mais le combat faisait rage, à l’instar de cette action où l’intérieure carrosienne tapait fortement la tête sur le sol au point de sortir pour récupérer. Le combat était violent et il faisait passer Booba et Kaaris pour Tic et Tac se disputant la dernière cacahouète Ben & Nuts.
Maguette parvenait à trouver Léana pour marquer un panier, puis Tinane obtenait 2 lancers qu’elle ne convertissait pas. Sur le rebond défensif, et avec 5 secondes à jouer, Carros parvenait à remonter le terrain et trouver un tir sur le buzz pour gagner le troisième quart-temps 15-12 et garder 14 points d’écart sur le score de 56-42.
Nous allions entamer le dernier acte du premier épisode de cette saison de basket avec beaucoup d’enthousiasme et de combativité.
Tout commençait par un cross de Zoé sur Pauline Dalmasso qui, déséquilibrée, chutait lourdement et se faisait mal à la cheville gauche. Le cross, c’est sa spécialité. La Mère Poulard, c’est les omelettes, Zoé, c’est le dribble bas rapide. Au passage, blague à part, nous avons appris que Pauline souffrait de cette cheville quand c’est redevenu froid et on lui souhaite un bon rétablissement.
Sur l’action, Zoé en profitait pour inscrire un tir longue distance et remettre le MBA à 11 points de son adversaire du jour.
Elle envoyait ensuite un caviar à Tinane qui marquait, puis, après un rebond défensif, passait à Chiara, Ivaldi, qui donnait à Léana pour un nouveau panier.
Si le retour d’Ella sur le terrain limitait temporairement la casse, Zoé envoyait encore Tinane au panier, puis ce fût à Jana d’envoyer 2 passes décisives à Chiara Ivaldi puis encore Tinane, et nous étions revenus dans le sillon de Carros qui ne menait plus que 58-55.
Ce regain d’énergie n’était pas sans rappeler les soirées scientifiques organisées chez Christopher Froome et cette remontée folle avait été un tel bazar qu’on se demandait si le public n’allait pas chanter le générique d’Intervilles. Surtout juste après que Maguette ait loupé ses 2 lancers-francs, mais elle arrachait un rebond offensif pour revenir à 1 point sur le score de 58-57.
Carros perdait une balle dont se saisissait Zoé pour aller au panier adverse. Elle en fût illégalement empêchée et obtenait 2 lancers.
On retenait notre souffle, autant que quand on voit débarquer à la Kermesse de l’école primaire Christian Quesada.
Zoé faisait preuve de sang-froid et inscrivait ses 2 lancers. A cet instant, nous prenions la tête du match et peut-être que Carros allait faire la même chose que l’usine AZF en 2001 : exploser.
Ce retournement de situation avait demandé bien des efforts et les organismes commençaient à peiner un peu, tout comme la lucidité de nos joueuses. Elles finissaient par avoir le même champ de vision que Ray Charles, à l’image de cette attaque menée à 1 contre 4 qui finissait par une balle perdue que Carros convertissait, en reprenant l’avantage.
Sur l’action suivante, Zoé servait Tinane qui enfilait un tir à 3 points et c’est maintenant 2 points d’avance que nous avions, à 62-60 pour le MBA.
Une nouvelle attaque un peu ambitieuse à 1 contre 3 donnait l’occasion aux carrosiennes de revenir à 62 partout, l’atmosphère était tendue, irrespirable.
Zoé provoquait une faute mais ne marquait qu’un lancer sur les deux qu’elle avait, cela nous redonnait la plus petite des avances.
Deux petits errements défensifs permettaient à Carros de reprendre un peu d’air puisque nos adversaires marquaient 4 points et menaient maintenant de 3 points sur le score de 66-63 en leur faveur. Le score n’allait plus évoluer pendant les 46 dernières secondes du match, malgré un temps-mort de Franklin qui tentait une dernière stratégie. Dans ce laps de temps, Tinane commettait sa cinquième et dernière faute tandis que Zoé tentait un ultime tir longue distance qui retomba sur l’arceau, mais ne transperça pas le filet.
Nous empochions le gain de cette dernière période sur le score de 21-10 et nous nous inclinions de 3 petits points sur le score de 66-63. Nous avions été à deux doigts de l’emporter comme on dit chez les lépreux du Sud de l’Inde.
Alors comme toute courte défaite, on repense à tous les moments du match, les petits loupés, les actions mal conclues, les lancers ratés, et on se retrouve dans la même position que Benoît Hamon un soir de scrutin, avec dans la bouche le goût amer de la défaite.
Et pourtant, pourtant, même si je déteste dire qu’une défaite est encourageante, et que ce match aura été frustrant, il est véritablement encourageant.
Les filles ne se connaissent pas ou peu, le travail collectif est en train de se faire, les réflexes sont à développer, et nous comptons dans nos rangs de nombreuses jeunes filles dont c’est la première année en cadettes. Et finir ainsi à 3 petits points de cette équipe carrosienne, après avoir réussi à revenir au score, puis mener, c’est vraiment prometteur et offre un avenir sous des cieux plutôt prometteurs.
Cela dit, les promesses n’engagent que ceux qui les croient, et rien ne sera possible sans travail ni abnégation, sans courage et combativité, une ardeur indéfectible et un tempérament de battantes, ce qu’elles ont su démontrer aujourd’hui.
Alors bravo les filles pour votre première sortie, vivement les suivantes !
Comme il est de coutume sur le blog, je vous laisse picorer dans ce diaporama les photos qui vous conviennent.