Elles ont eu un Carros à ronger

Et voilà. Il était temps de retrouver ses esprits et repartir à l’attaque, sans oublier la défense, et affronter un autre ogre de la poule A. En effet, Carros et sa nouvelle structure CTC, avait déjà l’année dernière fait parler la poudre en championnat PACA. Cette équipe était composée de grands gabarits qui contrastaient fortement avec nos frêles premières années. Une fois encore, nous allions devoir faire face à une équipe plus âgée, plus expérimentée, et qui venait de se défaire du Cavigal.

En ce samedi 7 octobre 2018, nous nous dirigions vers la nouvelle pépinière à talents qu’est la Halle des Sports de Carros, qui est une salle grande et agréable. Les arbitres étaient en place et, après un échauffement appliqué, il était temps de se lancer.

Zoé, Chiara, Thiziri, Hayam et Amélie démarraient la rencontre en ce jour anniversaire de la création de la RDA en 1949. Cette info, aussi anodine puisse-t-elle paraître, allait avoir un sens rapidement.

Tout d’abord, c’est sur la qualité de notre défense que nos filles allaient s’appuyer. Une grande intensité, consommatrice d’énergie certes, mais qui permettait de mettre nos adversaires en grande difficulté malgré leur avantage de taille. Notre défense, j’en viens à mon allusion précédente, c’était le mur de Berlin.
Thiziri ouvrait le score d’un tir longue distance, mais tout était loin d’être parfait. Si la défense était efficace, nos Walkyries lançaient des chevauchées un peu hasardeuses et perdaient pas mal de ballons, loupaient des tirs aisés. C’est de toute façon une caractéristique inhérente au jeu rapide que de dispenser quelques balles sur les contre-attaques, mais ça restait frustrant.
Après un temps-mort, Carros repartait à l’attaque, mais continuer de se casser les dents sur notre porte de Brandebourg humaine. Malgré ces loupés, le score continuait de se creuser… 8 à 2, puis 11 à 2 et enfin 13 à 2. Sur leur nuage, nos filles faisaient preuve d’une grande maladresse mais parvenaient à créer un écart conséquent, et ce malgré la rapide 2° faute de Thiziri qui laissait sa place à Inès.
Difficile d’être mécontent de ce début en fanfare que n’aurait pas dénigré ce fameux bandit italien connu sous le nom de Tony Truand. Mais allions-nous regretter ce déficit de réussite aux tirs ? Un peu quand même car les faits commençaient déjà à tourner étrangement, à l’image de cet évident passage en force de Carros qui se voyait sifflé en faute contre Hana.
Un petit passage à vide permettait à nos hôtes de remonter la pente lentement et le match prenait prématurément une tournure à rendre aussi dingue qu’un vegan enfermé dans un Hippopotamus.
Néanmoins, la première période était remportée 18 à 9, nous offrant ainsi 9 points d’écart alors que nous aurions dû certainement mener de 15 points aisément. C’est ainsi. Mais comparativement à la semaine précédente, nous étions bien mieux en place et plus libérés.

La deuxième période débutait sous la pression de nos adversaires et un petit vent de frayeur soufflait sur la nuque de nos cadettes. Les choix étaient étranges et les passes devenaient aussi précises que des centres de Layvin Kurzawa.
Nous encaissions un 5-0 et nous étions rejoints à 18-14 quand Geoffrey demandait un temps-mort.
La tête remise à l’endroit, nos jeunes joueuses redonnaient un élan à l’équipe et reprenaient la tête à 20-14, moment qui voyait le retour sur le banc de Maïssa au bénéfice de Thiziri.
Zoé, quant à elle, commençait à souffrir de douloureuses crampes à l’estomac qui l’empêchaient de donner tout ce qu’elle avait, dans le ventre, calembour.
A peine était-elle rentrée sur le terrain que Thiziri se faisait siffler une faute vraiment litigieuse, consécutive en plus à un retour en zone de Carros qui se retournait à notre désavantage.
Le problème c’est que Thiziri la lumière, c’était celle d’un volcan en éruption. Frustrée et déçue par la décision du corps arbitral, elle entrait dans une rage sombre à côté de laquelle Pascal le grand frère passait pour Gandhi sous Prozac. Evidemment, Philippe Ricard était un adepte de la non-violence prônée par le Mahatma et sanctionna les velléités de Thiziri par une faute technique bien pénalisante, à double titre. En effet, en un peu moins de 7 minutes, elle avait marqué 7 points, mais laissait Carros recoller au score et compromettait l’équipe par son influence défensive qui allait devenir forcément famélique.
Dans la foulée, la diaspora familiale se mit en route. Thilelli, énervée par le sort réservé à sa sœur, et frustrée par la faute sifflée contre elle, commençait à pester et s’exposait à une 2° faute technique consécutive. Elle sortait respirer avec sa sœur sur le banc.
Il était temps de reprendre le droit chemin de ce match qui dérapait un peu et de faire un point route comme savait le faire à sa grande époque Valérie Maurice, qui fêtait ce jour ses 54 ans.
Malgré ces micros évènements, nos U18 reprenaient la main et menaient 25 à 20 avant d’entamer une partition un peu plus crispée. L’enjeu, la tension, le fait de mener ? Des critères qui peuvent expliquer les nombreuses errances en attaque de l’Eveil. Zoé avait un bon passage, distillait de bonnes passes mais les paniers n’étaient pas tous convertis, de quoi nous refaire frissonner comme à Roquebrune.
Nous perdions ce quart-temps sur le score de 13 à 11 et à la mi-temps nous étions toujours devant à 29-22. Un écart de 7 points qui restait intéressant et déjà plus important que le nombre de manifestants à la gay-pride de Kaboul.

La pause venait à point nommé mais déjà nous pouvions compter les dégâts. Même constat que la semaine précédente, même si la physionomie était différente dans le démarrage de la partie, notre adresse aux tirs frôlait l’indécence avec un 10/42… Quel dommage de n’avoir pas plié le match bien plus tôt pour se mettre définitivement à l’abri.
Pour tenter de défendre cet avantage, voire l’augmenter, il fallait garder la tête froide. Pour ce faire, il était nécessaire de se concentrer et par exemple penser à un truc triste, comme les Bronzés 3.

Retour sur le terrain et déjà un changement notable. Carros sortait une bonne vieille zone des familles, dispositif défensif très souvent décrié et contre lequel on trouve de très nombreux détracteurs au sein des clubs de notre région.
Avec cette décision, nos adversaires allaient figer le match autant que le visage de Mickey Rourke.
Pendant de longues minutes, il ne se passait plus rien dans le jeu à tel point que même Expedia en aurait annulé son envoi de newsletter en croyant le compte désactivé.
Néanmoins, les positions s’ouvraient quelque peu et permettaient au score d’évoluer un peu, pas forcément en notre faveur. Un jeu statique délicat à apprécier mais nos filles tenaient le choc. Sur une dernière action en forme de reprise de dribble énorme de Carros sous les yeux de l’arbitre, le 3° quart-temps se terminait. Et nous le perdions sur le score de 10 à 7, il ne restait plus que 4 points d’avance à 36-32 pour nous. Ecart infime qui stressait les spectateurs des 2 camps tout autant que les joueuses.
D’ailleurs, revenir pour le 4° quart-temps donnait autant d’envie que quand à la crèche une dame vient vous voir pour se présenter et vous dit « Bonjour, je suis Josiane Dutroux, la Directrice ».

Mais il faut savoir vaincre ses peurs pour abattre ses démons, adage sereinement expliqué à Thiziri qui faisait son retour sur le parquet. 9 secondes plus tard, elle prenait sa 5° faute, mais cette dernière ressemblait plus à un acte de braconnage qu’une violation des lois du jeu… C’est ainsi… Thiziri payait son début de match enragé et ressortait penaude de façon définitive.
La partie s’emballait, devenait haletante, stressante, et le fil était toujours tendu, très tendu.
Hana tentait des shoots improbables, en loupait beaucoup, mais parvenait tout de même à maintenir le navire à flots. Les fautes s’abattaient sur notre équipe de façon irraisonnée. A tel point que même des cadres sportifs du club hôte s’en étonnaient eux-mêmes. Dans ce seul quart-temps, Carros allait se voir offrir 17 lancers-francs dont 6 convertis. User la défense, petit coup de pouce du destin dirons-nous…
Zoé faisait sortir la jeune Chloé Teyssier sur un des derniers drives qu’elle arrivait encore à exécuter malgré les douleurs lancinantes qui la handicapaient.
Question douleur, c’était au tour d’Amélie d’y goûter. Sur une pénétration déterminée, elle chutait et sa tête heurtait violemment le genou d’une Carrosienne. Le jeu aurait dû être arrêté immédiatement, je pense que l’état de notre joueuse, pourtant membre du corps arbitral à ses heures, ne soulevait aucune suspicion. Mais la contre-attaque se développait et Chiara, alarmée, stoppait le ballon et recevait une faute, sa 3°… On pouvait revenir à Amélie qui gisait au sol avec un visage tuméfié qui n’était pas sans rappeler la prestation sublime de John Hurt (qui porte bien son nom) dans Elephant Man. Malgré cela, nous étions toujours en tête et menions 42-39.
Chiara prenait une faute imaginaire, la 4°, et Carros rentrait ses 2 lancers, puis Zoé lançait Hana pour reprendre 3 points d’avance à 44-41.
Il restait 3 minutes à jouer, on sentait bien l’ensemble se fissurer, comme le bloc russe à la fin des années 80, et je ne dis pas ça parce que le 7 octobre, qui n’a rien de rouge, est aussi l’anniversaire de Vladimir Poutine.
Geoffrey sentait les choses glisser et il tentait d’endiguer la remontée de nos adversaires en donnant des instructions sur sa plaquette. Les divers schémas qui y figuraient m’évoquaient des hiéroglyphes et me rappelaient l’amour que je portais à l’Egypte et ses pharaons, ces types momifiés qui ont gardé la même tête des siècles plus tard comme Ramsès 2, Toutankhamon ou Jack Lang.
Ces 3 minutes allaient être celles de trop. Durant ce laps de temps, on se serait cru le 11 novembre 1989. Le mur de Berlin allait céder sous les coups de pioches des Carrosiennes et la RDA allait disparaître. Tout s’écroulait. Une interception de nos adversaires partait dans les gradins mais les arbitres sifflaient un entre-deux qui n’était pas à notre avantage. Puis Chiara prenait sa 5° faute sans bouger, suivie par Thilelli dans la même minute. Carros égalisait à 44 partout puis prenait 2 points d’avance. Ces derniers instants nous condamnaient à mort, exsangues. Cela dit, la mort, on y vient tous. Certains en voiture, comme James Dean, qui allait trop vite, ou Bob Kennedy, qui allait trop lentement. Mais que c’était glaçant de le constater avec impuissance.
Sans défenseur pour la gêner, la meneuse adverse crucifiait nos filles d’un 3 points transformé, et la dernière contre-attaque se déroulait sans réaction de notre part. Dernier acte perdu 21 à 8, le match perdu lui aussi 56-44.
Incrédules, nos filles constataient le score final avec le même regard vide que Manon des Marseillais de W9 si on venait de lui révéler l’existence de la chaîne « Histoire ».

Dura lex que celle du sport. Impitoyable résultat, rendons tout d’abord grâce à nos valeureuses adversaires qui n’ont jamais baissé les bras et qui ont su profiter de nos largesses défensives en fin de match, de notre horrible maladresse (sans faire une analyse statistique à la Jean-Pierre Gaillard, 17/82 c’est clairement insuffisant), et d’avoir su transformer les occasions que les arbitres ont pu permettre.

L’explosion de joie des joueuses de Carros tranchait avec la déception des nôtres, mais permettait aussi de comprendre combien elles appréciaient l’exploit de leur côté tout en soulignant la peur qu’elles avaient eue devant nos jeunes et talentueuses joueuses.

Le constat reste identique que celui réalisé à l’issue de la rencontre face à Roquebrune-Cap-Martin.
Deuxième match, deuxième déplacement, et deuxième équipe expérimentée à négocier.
Nos filles n’ont pas démérité, mais la tâche était trop ardue et il ne faut pas non plus leur demander l’impossible. Cela dit, si elles furent excellentes, on peut regretter la limitation du temps de jeu de Thiziri, les douleurs au ventre de Zoé, l’arbitrage aléatoire de fin de match et les 16 lancers convertis par nos hôtes durant la partie, et surtout notre maladresse qui me fait encore dire que si nous n’avions été que mauvais aux shoots au lieu d’avoir été très mauvais, nous aurions plié ce match bien confortablement.

Il faut donc garder confiance et louer la qualité de cet effectif qu’il faut faire travailler et progresser, qu’il faut confronter à des équipes plus matures, et leur faire prendre conscience de leurs possibilités. Ça prend du temps, le coach le sait, et il prendra celui nécessaire à l’éclosion de ces jeunes pousses. En tout cas, la partie nous a offert les sinusoïdales émotions que nous adorons et nous avons hâte de ressentir encore ce stress, en espérant que la prochaine fois la balance penche en notre faveur.

Ce sera la semaine prochaine contre Monaco, il faut nous préparer à la réception des asémistes comme il se doit. Et en attendant, après un goûter agréable et très convivial, voilà quelques souvenirs de cette dernière rencontre.

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